2020-0614 Tempêtes, submersion, érosion, entre Loire et Vilaine: quelles conséquences et comment s’adapter ?

Extrait d’étude de ELV association Estuaires Loire-Vilaine

L’urbanisme sur le littoral
La tempête Xynthia a mis en évidence la fragilité des zones conquises sur la mer et endiguées, mais aussi de l’ensemble des habitats construits sur des sols remblayés, sur des marais, d’anciens marais salants, des zones inondables, des dunes …
Aujourd’hui la menace ne vient pas uniquement du réchauffement climatique, comme l’explique Martin Juigner10 : « Dans les années 1960 la France a urbanisé massivement le littoral. Nous avons créé nous-même le risque côtier : si des maisons sont menacées, c’est par l’artificialisation qui fige le trait de côte. » Les maisons au XIXème siècle n’étaient pas construites face à la mer, mais protégées des vents dominants. Les exemples ne manquent pas : on peut le constater avec le port du Croisic. C’est avec le développement du chemin de fer, de la démocratisation des loisirs et la diffusion de l’automobile qu’une construction galopante a vu le jour sur l’ensemble du littoral, soumis dès lors à une artificialisation systématique. Cette époque correspond aux  »Trente Glorieuses » et à un  »laisser-faire » en matière d’aménagement et de réglementations. Des ports et leurs infrastructures attenantes sont édifiés sans vraiment prendre en compte les conséquences sur les courants ou sur les plages. Cet attrait pour la côte est lié à la beauté des sites … mais celle-ci est considérablement réduite lorsque tout est urbanisé ! Dans certains endroits les dunes fragiles sont loties ou aplanies pour créer des parkings. Il faut attendre 1986 pour que la loi « Littoral » fixe des règles d’urbanisme pour préserver ce qui reste avec le concours du Conservatoire du littoral. On a donc arrêté l’expansion des zones urbanisées sur le littoral mais on ne l’a pas réduite : le risque n’a pas disparu avec cette loi, on a juste arrêté d’augmenter la vulnérabilité.
Le trait de côte est donc particulièrement artificialisé et figé. En bétonnant le littoral, par manque de réflexion, parce que l’homme et la technicité voulaient s’imposer et non composer avec la nature, et aussi parce que beaucoup d’argent et sans doute de cupidité étaient en jeu. Plus de permis donnés, plus d’habitants et de taxes avec des emplois dans la construction, les services, les commerces. Une croissance économique forte qui favorisait l’optimisme et des projets fous comme par exemple une marina dans le marais salant de Guérande! On a donc artificialisé à outrance créant une hausse de la vulnérabilité et dans le même temps on a augmenté la hausse des aléas avec le réchauffement climatique : les tempêtes seront plus fortes, la montée des eaux importante. L’homme a ainsi créé les conditions d’un affrontement violent avec la mer d’où il ne sortira pas indemne.


Le réchauffement climatique et la montée des eaux
Le réchauffement climatique entraîne une élévation du niveau de la mer en raison de plusieurs phénomènes associés, dont les principaux sont la fonte des glaces et la dilatation des océans. Une augmentation de la température de plus de 3°C en 2100 est tout à fait possible et pour certains, elle sera même dépassée et atteindra +5°C. Pour mémoire il faut rappeler que la température moyenne pendant l’ère glaciaire était seulement de -5° par rapport à notre température actuelle. L’Europe était alors couverte de glace, le niveau de la mer était 120 m plus bas qu’actuellement et la Grande Bretagne était reliée au continent. Le réchauffement entraînera une fonte du permafrost (déjà commencée) en libérant des quantités considérables de méthane et accélérera ainsi le processus d’élévation de la température.
Les océans vont donc monter, selon les modélisations les plus optimistes (GIEC) entre 70 cm et 1m. Certains avancent des élévations d’1m50 à 3m et un effondrement des sociétés complexes consommatrices d’énergie carbonées peu chères.
Une mer plus chaude, c’est aussi de l’énergie emmagasinée qui alimente les tempêtes, les typhons les cyclones …
C’est aussi plus d’évaporation et donc plus de pluies, plus d’inondations mais pas partout dans le monde, car ce sera aussi plus de régions désertiques avec les conséquences humaines inévitables et les grandes migrations de populations. Les changements climatiques impactent notre vie et leurs manifestations vont s’accentuer.

La tempête Xynthia

Cette tempête Xynthia est une dépression profonde mais qui n’est pas exceptionnelle. On mesure des vents à 160 km/h sur l’île de Ré. Par contre elle est concomitante à des marées fortes, 102 de coefficient, et les vents les plus violents sont au moment de la pleine mer. Avec l’onde de marée, une pression atmosphérique basse, des vents violents, une houle importante, la surcote est d’1m50 en moyenne, et plus, lorsque la configuration de la côte crée des étranglements, rias, estuaires, étiers. La submersion entraînera la mort de 59 personnes et des dégâts matériels de plus de 2 milliards. A la suite de cette catastrophe, un urbanisme débridé est remis en cause, la surveillance et la réfection de 5000 kms de digues envisagé . (voir les mesures)
Cette carte  »Xynthia » entre Loire et Vilaine (voir sur pdf du site) nous montre des brèches dans les digues du traict du Croisic et de Mesquer et les marais salants submergés sur certains secteurs. Localement les villes du Pouliguen et de la Baule sont inondées, 200 bâtiments inondés à la Baule mais également aux Moutiers en Retz. Les quais du Croisic sont sous l’eau, les conduites d’assainissement explosent en de nombreux endroits. La basse Loire est submergée :
Cordemais, Paimboeuf, Le Pellerin, jusqu’à Couëron. Des travaux suivront cet épisode dramatique en particulier la constitution d’une protection d’1 m le long de l’étier du Pouliguen. (voir solutions)

Élévation de la mer d’1m : un scénario optimiste ?

La culture du risque

L’Etat, les plans de prévention

Les solutions : comment s’adapter et vivre avec le risque

Lire la suite sur le document d’ELV, avec des cartes très précises des conséquences plus ou moins dramatiques suivant les scenarios…

Conclusion :
Ce tableau pourrait paraître pessimiste. Mais il faut être lucide : les événements décrits viendront très vite, en plus ou moins forts, plus ou moins rapprochés. Il faut y être préparé mentalement (connaissances, solutions) et mettre en place pour y faire face des stratégies personnelles et collectives. Il est possible de vivre avec ces événements si on sait vivre avec les phénomènes naturels et les anticiper.
Ce qui apparaît à la lecture de ces cartes de submersion, c’est que les activités professionnelles, l’habitat, les installations industrielles devront être reculés dans le rétro-littoral. Nous touchons là les limites de la capacité d’accueil des territoires. L’espace serait très limité, prenant la place des terres agricoles, alors que, dans le même temps, il y a une demande locale importante pour que l’agriculture biologique, le maraîchage et les circuits courts se développent. On sait par ailleurs que le SCOT* prévoit et encourage une augmentation de la population de 20 à 30% sur le littoral dans les années 2030 sans prendre en compte cette évolution climatique et les phénomènes associés !
La solution serait que le réchauffement climatique ne dépasse pas 2°C en 2100. Cela pourrait se faire si la prise de conscience était collective et que la réduction des énergies carbonée dans la production d’énergie, les transports et la consommation soit effective.
Elle doit se faire au niveau national, mais surtout à l’échelle de l’Europe. En admettant que cela se fasse, et ce n’est pas gagné au niveau européen, il restera à entraîner le reste du monde dans cette démarche. Cela ne se fera pas sans de l’aide et du partage avec les pays en voie de développement. Vaste chantier et douce utopie qui dépendent de l’acceptation des populations (pas forcément d’accord) et de la lenteur des prises de décisions.
Des informations préventives à partir de partages d’expériences sur le terrain seraient les bienvenues. Par exemple en proposant des solutions douces, que nous verrons dans le cadre des articles sur les tempêtes et l’érosion, qui peuvent retarder les effets sur le littoral et donner du temps à l’adaptation et à la culture du risque.
Chercher et mettre en place des “Solutions fondées sur la nature”, comme le préconise l’UICN semble une voie très intéressante21. Par exemple, mettre en évidence le rôle des écosystèmes naturels marins et littoraux dans la préservation du trait de côte est aussi une solution visible et reproductible (comme la préservation d’une dune naturelle). L’enjeu est important et nous en reparlerons dans les prochaines Newsletters. ELV

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